Comment faire évoluer les consciences ?

Aujourd’hui, je suis allée à la rencontre de Franck Vogel, photographe pour GEO, réalisateur et conférencier spécialisé autour des questions environnementales et de l’eau. Franck est un ami que j’ai rencontré il y a une dizaine d’années à l’occasion de mon stage chez « Je veux être photographe ». Je trouve son histoire très inspirante et j’ai voulu vous la partager…

Avec Franck, nous partageons cette volonté de faire évoluer les consciences grâce à nos arts respectifs.

Voici ce qui est ressorti de nos échanges.

 

Franck Vogel, éveilleur de conscience

Bonjour Franck, peux-tu te présenter en quelques mots ?

Je suis Franck Vogel, j’ai 45 ans et je suis photographe, conférencier et réalisateur documentaire. Ce que je cherche à faire à travers mon activité, c’est passer des messages et inspirer les gens.

Parle-nous de ton activité : quelle est son histoire ? Comment t’est venue cette idée ?

Je suis ingénieur de formation et après avoir été consultant pour un cabinet de conseil américain, je me suis lancé en 2001 dans un voyage en stop d’un an en Afrique et en Asie au cours duquel j’ai réfléchi sur ma vie et sur ce que je voulais faire, et je je l’ai compris au cours d’une retraite en Birmanie : voyager, rencontrer des gens, faire de la photo et passer des messages, sensibiliser et inspirer les gens, au travers de mes reportages.

Je me suis donc lancé dans la photographie et puis j’ai fait des films pour France Télévision et je suis conférencier pour les entreprises et les institutions dans le monde entier.

Pour cette dernière casquette, c’est l’académicien Erik Orsenna qui m’a mis le pied à l’étrier : on a fait une conférence ensemble et il m’a expliqué comment vivre du métier de conférencier. Aujourd’hui, c’est la même agence que lui qui me représente.

Je viens de développer avec mon épouse l’entreprise Art Vision Monde, et notre projet est de créer un grand festival autour de l’environnement et de l’innovation, à Issy-les-Moulineaux pendant les JO de Paris en 2024.i

Quels services proposes-tu et à qui s’adressent-ils ?

Je fais des reportages pour les magazines, enfin c’est souvent moi qui les propose. 

Je travaille beaucoup avec Géo et je couvre des sujets liés à l’environnement, mais aussi des sujets sociaux et géopolitiques. Je leur propose les sujets et ensuite c’est eux qui les produisent. Je les présente aussi dans des livres, lors d’expositions, et je donne des conférences autour des thématiques abordées.

J’ai beaucoup travaillé sur l’eau, et en ce moment je me focalise sur les forêts en France avec le fonds de dotation Botanic : il y a une exposition qui tourne dans tous les 80 magasins botaniques de France, depuis décembre 2022. C’est Irène Frain, une amie romancière, qui s’est occupée d’écrire les légendes car l’idée était de donner la parole à la forêt, et Ziqi Peng qui s’est occupée de la direction artistique. L’exposition s’appelle « Moi la forêt ». J’ai commencé par les forêts de Savoie et de Haute Savoie et l’expo va circuler jusqu’en juin 2023, puis la deuxième série sur les forêts du sud devrait débuter à partir de l’été prochain.

Il y aura aussi une exposition au Musée de Mobilier National aux Gobelins fin mars pendant une semaine qui devrait être inaugurée par Brigitte Macron et la Ministre de la culture !

Sinon mon dernier périple m’a emmené au Pérou pour un reportage sur l’or et des nouvelles filières plus propres et plus durables qui sont en train d’être mises en place entre le Pérou et la Suisse : du début de la chaîne dans les mines jusque chez les horlogers et transformateurs d’or en Suisse. Ce travail devrait être publié dans le numéro d’Avril ou Mai 2023 de Géo.

Peux-tu m’en dire plus sur ton projet de festival avec Art Vision Monde ?

Ca va être autour de l’art bien entendu, et l’idée c’est de sensibiliser et de proposer des solutions à travers l’art aux problématiques environnementales. Donc il y a différentes thématiques : eau, énergies renouvelables, recyclage, agriculture régénératrices, forêts… plein de thématiques différentes, qui vont aussi dépendre des partenaires qui vont nous rejoindre. Il y aura des expo autour de ces thématiques, ainsi que des performances, de la vidéo, de la réalité augmentée… Le festival aura un jumeau numérique qui sera visible jusqu’à plusieurs années après le festival : on pourra s’y promener soit à l’aide de lunettes 3D, soit avec son téléphone, soit avec son ordinateur. On pourra même aller jusque dans les sièges des entreprises partenaires qui auront l’oeuvre dans leur siège. L’idée est vraiment d’avoir un truc immersif et visible pendant longtemps.

Il y aura des conférences et des tables rondes autour des différentes thématiques. Notre volonté c’est de sensibiliser !

 

Qu’est-ce que tu aimes le plus dans ton activité ?

Partager ! J’aime bien faire des sujets, être sur place avec les gens, voyager, rencontrer les gens et passer des messages positif ou négatifs, s’il faut dénoncer des choses je les dénonce ! L’idée c’est de passer des messages et à mon niveau, ce que je considère être ma mission. Je ne suis pas un expert scientifique qui va proposer des solutions techniques ou autre pour changer, mais mon rôle à moi c’est de planter des graines dans le cerveau des gens pour qu’il y ait une évolution.

Quelles sont les valeurs que tu portes ?

Le respect de l’environnement, l’éthique, la sensibilisation.

Avec cette activité, quelle est ta contribution au monde ? (social, humain, environnemental) ?

Planter des graines par l’intermédiaire de conférences, de reportages photo, d’expositions, de films, d’interventions… Tous les médiums sont possibles. Peut-être le cinéma un jour peut-être ?

L’idée est de toucher le plus de monde possible, et de surtout toucher les gens qui ne sont pas convaincus. C’est facile de faire des conférences dans des groupes écolos ou autre, mais ça ne change rien. Il faut aller dans les entreprises, voir des gens qui ne sont pas forcément d’accord, et c’est eux qu’il faut convaincre ! C’est pas les gens déjà convaincus, ça sert à rien. Il faut toucher tous les autres : et il y en a beaucoup.

C’est quoi pour toi être un entrepreneur engagé ? Quels engagements prends-tu pour l’environnement ?

C’est de passer les bons messages, d’inspirer avec des sujets qui dénoncent mais ce qui marche le mieux c’est d’inspirer par le positif : par exemple avec les bishnoïs, le premier groupe d’écologistes en Inde, qui sont très inspirants et j’interviens encore régulièrement pour parler de leur philosophie et de leur adaptation au changement climatique. Ce qu’on vit aujourd’hui, eux ils l’ont vécu dans le désert du Thar au Rajasthan, dans une crise gravissime : en gros soit ils changeait, soit ils mourraient. L’être humain ne réagit que quand il est face au mur et c’est son gros problème ! Le changement climatique est quelque chose de réel, mais progressif : et c’est pour ça que l’être humain ne bouge pas. On le voit : les COP ça sert à rien, on parle mais on ne change pas. L’idée c’est de faire changer les choses non pas au niveau politique, parce que eux ce qu’ils veulent c’est se faire réélire, rien d’autre; mais là où il faut agir c’est au niveau des populations ! Si elles ont une prise de conscience on pourra éviter une situation dramatique

Les bishnoïs (peuple indien, photo ci-dessous) ont réussi, mais c’était très dur : un visionnaire les a guidés à s’adapter, en arrêtant de consommer de la viande entre autres. Chez eux c’est pire que chez nous parce que c’est un désert ! Ils n’ont pas eu de pluie pendant 10 ans donc ils mourraient. Et aujourd’hui chez nous on est très loin de ça, donc il n y a pas assez de gens touchés. C’est triste mais on est obligé d’en arriver jusqu’à être touché dans sa chair pour bouger.

L’humain fonctionne encore beaucoup sur le cerveau reptilien : ce qui lui apporte du plaisir – de la dopamine- c’est de bien manger, dominer ses semblables, avoir des rapports sexuels, capter de l’information et faire le moins d’effort possible. Il faudrait trouver le moyen de rendre plus simple l’écologie : c’est pour ça que je plante des graines. Nous devons lutter contre ce cerveau là, c’est un effort, c’est pourquoi la question écologique n’est pas si simple. Je pense qu’on va y arriver mais ça va prendre du temps et nous allons devoir passer par des phases un peu sombres.

Quels sont tes loisirs / passions à côté de cette activité ?

Je n’ai pas de loisirs à côté parce que mon activité EST ma passion. 🙂

Rêvons un peu : à quoi ressemble selon toi la société idéale de demain ?

Elle serait moins égoïste, moins primitive, moins « reptilienne ». Plus orientée vers l’autre, dans le partage et non pas que le partage entre humains. Je suis plus sur la philosophie bishnoïs : il faut être au même niveau que ce qui nous entoure : les arbres, les animaux… Il faut être en harmonie avec ce qui nous entoure et je pense que le modèle bishnoïs est bon là dessus. Je ne dis pas qu’il ne faut pas manger de viande, mais il faut qu’il y ait un respect, c’est le point le plus important. Après si tout le monde arrive à se respecter, on va forcément y arriver ! Il faut qu’on s’élève spirituellement. On est « censé » être les êtres les plus intelligents sur terre, ce que pensent les bishnoïs aussi : avec le plus d’intelligence, le plus de conscience… on est au plus « haut » de l’évolution, c’est donc notre responsabilité de nous occuper des autres mais on ne le fait pas et c’est ce qui ne va pas ! Pour moi on est dans une société où il y a une vraie harmonie à mettre en place, pas seulement entre humains.

Dans l’histoire de l’homme il y a eu de belles périodes et des périodes horribles : j’ai l’impression que c’est des cycles et qu’on ne peut y échapper. La vie n’est pas un long fleuve tranquille, il y aura toujours des bugs : on arrivera jamais à une perfection. Quand on cherche la perfection, on rencontre des bugs.

La lumière n’existe pas sans l’ombre, n’est-ce pas ?

Exactement ! je pense qu’il faut les deux. C’est le Yin et le Yang quoi. On ne peut pas être que dans le positif, parce que ça ne marche pas. Il y aura toujours des gens aux idées plus noires que d’autres.

As-tu entendu parler du modèle synarchique ? Où les dirigeants sont nommés (et non élus) parce qu’ils ont déjà prouvé qu’ils oeuvraient pour le bien commun (au contraire de notre modèle où les dirigeants font des promesses qu’ils ne tiennent pas) ?

Non mais ça me fait penser au modèle Suisse où les ministres sont nommés à vie (et non élus) en fonction de leurs compétences. Ils sont 7, et ils exercent sur le long terme. Le peuple va voter sur chaque sujet donné. Ils votent beaucoup du coup, mais je trouve cela très intéressant. Parce que chez nous ils ne pensent qu’à se faire réélire ! Ils changent deux trois trucs que le précédent avait mis en place, et ensuite à l’approche des élections ils ne font plus rien parce qu’ils sont en campagne ! Ce modèle ne fonctionne pas, je suis contre. Ce n’est pas démocratique. Le modèle suisse est bien mieux ! On ne vote pas pour des personnes mais pour des idées.

Alors Franck, dis nous comment faire évoluer les consciences ?

Il faut utiliser plusieurs moyens et non qu’un seul car tout le monde n’est pas sensible au même moyen de communication. Souvent je combine mes conférences avec la photographie, je raconte une histoire et je fais une sorte de « show » pour embarquer les personnes et les faire rêver. C’est psychologique : on arrive à amener un message en permettant au personnes de se reconnaître et de vivre une émotion, en alternant avec des moments plus bas car si l’émotion est toujours haute au bout d’un moment le public décroche. Les gurus savent très bien faire cela. Je n’en suis pas un mais j’essaie de passer les messages avec ces techniques parce qu’elles fonctionnent.

Avoir le visuel photo ça marche bien. Le documentaire en revanche ne marche pas trop car il ne va intéresser que des personnes déjà sensibilisées. Le cinéma m’intéresse davantage parce qu’il touche le grand public. Des films comme Don’t Look Up avec des stars vont toucher un public beaucoup plus large qu’un documentaire ou un film d’art et d’essai qui va toucher un public déjà sensibilisé. Le cinéma permet d’élargir beaucoup plus car c’est Mainstream, d’autant plus si une star s’engage dans le projet. Cela permet de convertir des personnes qui n’étaient pas sensibles du tout.

Les conférences, les photos, les belles images et les histoires permettent de convertir des grands groupes, des personnes qui ne sont pas sensibles du tout à l’écologie, en leur faisant vivre des émotions. Et franchement ça marche ! Parce que les gens se sentent mieux, ça les fait rêver, ça leur donne envie de voyager, et les messages sur l’environnement passent mieux. Ce qui serait l’idéal pour moi, c’est qu’ils deviennent à leur tour des passeurs de messages. Je suis intervenu en tant que conférencier pour les associés d’un grand cabinet de conseils, et cela a beaucoup plu : j’ai ensuite été convié pour le colloque national des associés, puis certains d’entre eux m’ont contacté m’ont fait intervenir pour leurs équipes. Les retours ont été super positifs ! Les messages ont été passés. Pour moi, c’est cela la réussite dans le fait d’ouvrir les consciences. Travailler pour Géo c’est génial, mais son lectorat a déjà la conscience bien ouverte. Je pense avoir plus d’impact au travers des conférences.

Agir en art & conscience 🙂

Selon toi, quel(s) rôle(s) peuvent jouer l’illustration et l’art dans l’ouverture des consciences ?

L’illustration permet de créer des images qui n’existent pas forcément mais qui simplifient et permettent aux gens de faire certaines connexions. Elle permet de montrer des choses que l’on ne peut pas montrer en photo ni de manière réelle. L’illustration permet de combiner des choses réelles et non réelles : elle permet d’expliquer plus facilement les choses et de passer des messages. J’adore Sempé : souvent il n y a pas un mot dans ses dessins, mais il arrive à passer des messages de manière poétique ! 

Quand je travaille en photo, souvent j’imagine les images que j’aimerais avoir et si la situation en réel se passe, je vais être plus réactif. Parce que les scènes sont très fugaces. Lors de mes reportages pour Géo, chaque double page doit raconter une histoire. Et ce n’est pas évident ! C’est pourquoi j’anticipe et j’imagine les images dans ma tête, cela me permet d’optimiser mes chances de capturer la scène quand elle se produit.

Merci Franck ! 😊​

Contacts

Si vous souhaitez retrouver le travail de Franck, et le faire intervenir dans votre entreprise, voici ses contacts :

Pour lire encore plus de contenu inspirant, sur la communication et l’éco-responsabilité, je vous invite à lire les autres articles de mon blog.

Cet article vous a plu ? Vous souhaitez vous aussi agir pour la planète au travers de votre activité professionnelle ?

Abonnez vous à ma newsletter et recevez le Guide de la communication responsable dans votre boîte mail ! 😉

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription. 🐝
Votre inscription est confirmée. 😉

Pour vous tenir informé·e de mes dernières nouveautés, et recevoir des conseils en communication responsable : inscrivez-vous à mes courriers illustrés 😉✉️